Lorsque l’année touche à
sa fin, le moment de jeter en regard derrière pour choisir ce que l’on apporte
avec nous vers l’avant arrive. Pour un cinéphile, une part de ce processus
implique un survol de l’année au cinéma et voir ce qui reste. Lorsque j’ai
commencé à jeter un coup d’œil aux films visionnés cette année, j’ai réalisé
qu’il y avait tellement de choses à discuter que ne faire qu’un « top
10 » était trop restrictif. Ma liste des 10 films favoris viendra
inévitablement, mais j’ai décidé que je prendrais de l’avance avec d’autres
films et moments cinématographiques marquants.
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Citizenfour
Citizenfour
est plus terrifiant que la majorité des films d’horreurs qu’il m’ait été donné
de voir de toute ma vie. Laura Poitras, ainsi que certains journalistes,
conduisent une série d’entrevue avec Edward Snowden, l’homme derrière une des
plus grandes divulgations d’informations top secrètes de l’histoire des
services secrets américains. Par contre, Poitras ne s’arrêtent pas aux
plusieurs jours passés en entrevue dans la chambre d’hôtel qui forment le cœur du
film, mais contextualise les événements et montrent les impacts à courts et
long termes de la chose et le prix à payer pour tous ceux impliqués à toutes
les étapes de la manipulation de cette information. Snowden insiste qu’il ne
veut pas que l’histoire soit à propos de lui et que l’information qu’il
divulgue est l’aspect important, mais le documentaire fait fit de ses requêtes
pour peindre le portrait d’une figure qui est avant tout un homme. Bien sûr, c’est
quelqu’un de brillant et courageux, mais il est aussi vulnérable et faillible
(et qui n’est pas le maitre de ses cheveux). L’éponyme Citizenfour n’est qu’un
jeune talent informatique de 29 ans avec des visions pour lesquels il est prêt
à compromettre sa sécurité, prouvant qu’être un jeune idéaliste mène des fois à
quelque chose de concret. Le format documentaire n’offre pas que l’histoire
incroyable d’un pays (le plus puissant au monde), sa relation avec son peuple
et la sécurité de ce dernier, mais développe une figure inspirante qui ne vient
pas de bande-dessinées ou de romans utopiques, mais qui existe présentement
quelque part dans le monde. Citizenfour
serait un excellent programme double pour enchainer tout de suite après Captain America : The Winter Soldier.
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Godzilla
Je suis prêt à accorder tous
les points aux gens qui avancent les diverses critiques sur la première partie
du film. Après une introduction très forte, le film avance très tranquillement
jusqu’à sa résolution avec des personnages très unidimensionnels qui ne
plaisent pas à tous (je suis prêt à débattre une certaine profondeur à
Kick-Ass, mais c’est une discussion pour une autre fois), mais la finale
compense largement pour tout cela. Le combat qui conclut l’histoire offre aux
fans de Kaijus une séquence historique qui mérite toute la patience mise de l’avant
lors de la progression tranquille. Qu’Hollywood mette autant d’argent pour
produire un combat d’une telle ampleur dans une franchise de film fondée sur
des luttes entres hommes en costumes qui piétinent des modèles réduits me rend
si heureux que je suis prêt à pardonner beaucoup.
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Frank
La dichotomie qui semble
inévitable entre le succès commercial et la voix de l’auteur ronge n’importe
quel domaine artistique. Frank parle
d’un groupe de musique, mais pourrait aussi bien parler de cinéma, de peinture,
de bande-dessinée ou de théâtre. Personne n’entre dans un domaine créatif en se
disant qu’il va aller chercher quelques dollars facile et pourtant, le succès
commercial vient généralement avec une audience et plus de succès élargit sans
arrêt l’étendu du message. Par contre, plus on tente d’aller rejoindre de gens,
plus la spécificité de l’art devient soudainement une barrière qui peut baliser
le public potentiel. Frank explore
cette lutte en lui donnant un visage (littéralement) sous la forme de Michael
Fassbender et la tension entre son intégrité artistique et son désir d’être
entendu. De plus, pour un film qui est souvent vendu comme étant « Micheal
Fassbender qui porte une énorme tête de papier maché », il critique de
façon très intelligent la propension des médias sociaux à rendre viral des
caractéristiques superficielles de produits ou nouvelles, diluant et corrompant
le véritable impact voulu. Et aussi : jamais assez de Domhnall Gleeson. (Critique complète)
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The Infinite Man
Une comédie romantique
ficelée si serrée qu’il est impossible de jouer avec une ligne de dialogue, une
scène ou un développement de personnage sans que la chose au complet ne se
défasse. La quête unique d’un personnage qui s’étend sur plusieurs années qui
sont en fait la même répétées plusieurs fois dans un unique lieu est captivante,
même si ce n’est que pour tenter de parcourir le complexe labyrinthe de
versions futures et passées du même couple d’individus afin de garder de l’avance
sur un script qui ne cesse de rajouter des embuches, tournants et cul-de-sac
dans une simple quête personnelle. (Critique complète)
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Locke
L’idée d’un unique lieu
avec un seul acteur est toujours un défi de taille. Il faut garder le film
visuellement dynamique, trouver une histoire toute sauf monotone et un acteur
qui captive l’audience par sa seule présence. Tom Hardy habite le siège
conducteur de son automobile comme pas deux et n’en sort jamais. Le fait que ce
film existe et ne soit pas terriblement ennuyeux est en soi un accomplissement
de taille, mais qu’il fasse autant d’effet en est un encore plus grand. Ivan Locke
est un personnage fascinant en soi, il est compétent, rigoureux, noble, responsable
et ce sont toutes des qualités qui ressortent simplement dans son approche aux
gens avec qui il interagit au téléphone. La performance à elle seule mérite que
le film soit vu.
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Mommy
Même s’il ne fait pas mon
top 10, Mommy contient malgré cela ma
scène favorite de l’année qui met de l’avant tout ce qu’il y a à savoir sur ce film, il est touchant,
personnel, intime et démontre un véritable amour envers ses personnages. (Critique complète)
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Neighbors
Oui le film est drôle et
oui Zac Efron surprend tout le monde avec ses talents comiques et le message d’adultes
qui doivent prendre leur part de responsabilité comme le jeune de fraternité
est étonnamment mature et oui il y a un combat de godemichets dont on parlera
pour des générations à venir, mais je veux parler ici de Rose Byrne. Neighbors est discrètement progressiste
dans son approche d’un personnage qui aurait facilement pu tomber dans le
cliché de « la femme geignarde qui empêche les hommes (et surtout l’audience)
d’avoir du plaisir ». Le scénario résout ce problème en faisant de son
personnage féminin quelqu’un d’aussi déterminé, stupide et surtout d’aussi
drôle que ses compatriotes masculins et c’est cette stupidité qui fait du
personnage une femme subversive dans le paysage des comédies Hollywoodienne
contemporaines, un monde peuplé uniquement d’hommes qui ont du plaisir
ensemble.
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Nightcrawler
Ce regard qui représente
parfaitement une des meilleures performances de l’année, du moins l’une des
plus marquantes. Un conte terrifiant d’un ambitieux déterminé qui avance tel un
rouleau compresseur avec le rêve américain et l’absence totale de moralité
comme combustible. (Critique complète)
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The One I Love
Avec sa prémisse si
simple, mais si originale, The One I Love
explore profondément les problèmes et tensions brutalement vraies d’une relation
de couple. Lorsqu’on s’approche à une histoire qui ne dépend que des
développements de personnages pour avancer, il est important que l’audience
puisse s’accrocher au peu qu’il y ait à l’écran, et dans ce cas-ci, la relation
de Mark Duplass et Elisabeth Moss prend tellement de place qu’il n’y a jamais
de temps mort. La dynamique de couple crédible permet ainsi de se concentrer
sur les problèmes tout en ne soulevant pas la question du « pourquoi
sont-ils ensemble en premier lieu s’ils ne font que s’irriter l’un l’autre?». Ils
ne sont pas particulièrement intelligents, débrouillards ou honorables et leurs
défauts comme leurs qualités sont mises de l’avant pour offrir un couple de
personnes qui sont loin d’être parfaits, mais sont avant tout humains. (Critique complète)
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Under The Skin
Ce film ne sera pas sur ma
liste de films favoris pour la principale raison que je n’ai absolument aucune
envie de le revisiter. Par contre, ma phobie de ce film est pour les meilleures
raisons : il est incroyablement efficace et pertinent à un tel point qu’il
me hante encore à ce jour. J’ai une copie DVD parmi ma pile de films « à
écouter » et chaque fois que je regarde la figure translucide de Scarlett
Johansson à travers les étoiles sur la pochette qui me fixe d’un regard vide et
perçant, je repense à la scène du bébé sur la plage, à ses cris désespérés et
son visage crispé de douleur à force de s’époumoner, sans aucune autonomie et
s’efforçant de se dresser sur ses petites jambes. Cette scène à très peu à voir
avec l’ensemble du long-métrage, mais est de loin celle qui m’a le plus marqué.
Ce dernier est rempli de segments qui font froid dans le dos, culminant en une dernière
scène qui termine cette fable féministe sur une ponctuation finale dévastatrice
qui va de pair avec le propos. Le film était marquant et est une forte
recommandation pour ceux qui sont intéressés par ce genre de cinéma beaucoup
plus expérimental. Par contre, je ne planifie pas de le revoir de sitôt (et on
parle ici d’un film qui inclut Scarlett Johansson qui se dévêtit de plus en
plus tout au long du film).
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We Are the Best!
Un film à propos de
jeunes filles en colères qui dirigent leurs frustrations vers un groupe punk,
sans avoir de talent musical quelconque vient appuyer sur beaucoup de mes
boutons. Leur sentiment marginal, leur innocence ignorante mais si vraie, leurs
excitations, leurs difficultés forgent l’une des amitiés les plus honnêtes de l’année. (Critique complète)
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Wetlands
Un curieux petit film à
propos d’Helen, une femme qui a une fascination pour tout ce qui est fluide ou
organique. Wetlands nous met le nez
dans certaines des choses les plus dégoutantes qu’il m’ait été donné de voir
sur un grand écran et le courage dont il fait preuve tout au long du film
pardonne sa finale qui tombe dans le plus simple cliché prévisible. Que ce soit
simplement pour la performance qui supporte le film, il est digne de mention.
De plus, si vous avez peur que les choses dégoutantes vous rebutent, ils ne
sont pas pires que certaines images graphiques qui sont mises en scènes dans
des films d’horreurs ou d’actions sanglants. Les images sont approchées d’un
point de vue sexué qui pourrait être catégorisé de « déviant » et c’est
probablement ce qui provoque le malaise, mais c’est en ouvrant les yeux sur des
choses nouvelles et aussi particulières que l’on devient une personne plus
ouverte d’esprit, surtout lorsque ces « déviances » sont humanisées
par Carla Juri. Elle accueille le public à bras ouverts et rend un film aussi dégoutant
très accessible, manifestant de la passion pour son sujet comme on voudrait que
plus d’enseignants aient. (Critique complète)
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Wild
Je comprends finalement l’excitation
générale que mon entourage ressent pour Jean-Marc Vallée et je peux être un bon
cinéphile québécois comme il se doit! Wild
explore les difficultés d’un personnage qui n’a pas eu de chances dans la vie
et qui décide qu’elle ne pourra avancer dans la vie si elle n’apprend pas à
faire la paix avec soit même et s’approprier qui elle est (rajoutant à l’aspect
féministe du film, une caractéristique qui mérite en soit au film une place sur
cette liste). (Critique complète)
MUK
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