mercredi 3 décembre 2014

Whiplash

Directeur : Damien Chazelle
Réalisé en 2014. Avec : Miles Teller et J.K. Simmons.


Whiplash est un film à l’effigie de sa trame sonore, énergique et rythmée et couvrant un large champ d’émotion. C’est un petit film qui, par ses thèmes d’ambition, de succès et d’excellence atteint des hauts sommets. Ce rythme est supporté par deux performances incroyables qui électrisent l’écran avec une telle tension qu’on craint à chaque scène qu’elle s’enflamme pour de bon. Ainsi, avec une trame sonore explosive et le tonnerre entre deux personnages qui n’arrêtent de se s’entre-surpasser, Whiplash recharge les batteries et vous fera mimer d’asséner des coups de baguettes sur des tambours plusieurs heures en sortant du cinéma.

Miles Teller est une jeune musicien de jazz aux plus grandes ambitions, devenir un membre de l’élite musicale dont les gens parleront autour de leur repas des décennies plus tard. Pour atteindre ce statut, il doit passer sous la tutelle de J.K. Simmons, le chef du meilleur orchestre dans la meilleure école de musique du pays. Il est important de mentionner que les deux hommes sont fous. Par contre, cette folie ne vient pas du néant, mais plutôt d’une motivation à toujours aller plus loin et de vouloir pousser pour l’excellence, ne pouvant s’arrêter ailleurs. C’est cette folie qui les caractérise, mais qui leurs permets aussi de se distinguer et d’accomplir leurs objectifs, puisque le film argumente que derrière chaque titan musical, il y a un brin de dégénéré. Les deux hommes qui occupent l’ensemble du film donnent des performances qui vont les définir pour des années à venir.


J.K. Simmons fait de son Jonah J. Jameson un tortionnaire machiavélique qui n’hésite pas à utiliser toute sorte de tortures mentales et émotionnelles pour pousser ses disciples le plus loin possible, ne croyant pas qu’il est possible de les briser (et que s’il les brise, ils n’étaient pas fait pour cela). Miles Teller crispe son visage de douleur en battant des tambours si souvent et avec tellement de convictions qu’il n’est pas étonnant de se demander à quel point il joue et à quel point il souffre réellement. Il prend son habituelle personnalité détachée et comique et la déforme ici en personnage antisocial qui est détaché de toute relation humaine, ne voyant pas la pertinence en dehors de celle avec sa batterie et son entraîneur, ajoutant une touche masochiste au musicien forcené. Il pousse son jeu jusqu'à venir affronter nez-à-nez le monstre qu'est Simmons dans certaines des séquences les plus enragées de l'année.

Une histoire aussi restreinte pourrait facilement donner un film répétitif, mais le dynamisme de l’image et du montage donne à l’élément musical et aux dialogues du film de l’énergie et du punch qui s’assure qu’on ne puisse s’ennuyer une seconde. Il y a un grand nombre de séquences instrumentales où Teller joue de la batterie et les angles de caméra, la musique en tant que telle et le jeu des acteurs transforment chacune de ces séquences en petite histoire qui fait progresser et approfondi la dynamique des personnages. L’excellent montage ne fait aucunement douter des talents de Miles Teller à la batterie, même s’il est évident que l’acteur n’est pas le meilleur musicien de sa génération comme le personnage l’est. Le montage établi le mélange de musicalité et de violence lors de chacune des répétitions, montrant toute la sueur et le sang qui sont versés derrière chaque performance musicale en plus des dynamiques de pouvoirs en place qui entourent tous ces efforts.


L’aspect le plus marquant du film (les performances) vient ajouter au thème d’excellence qui passe par le sacrifice de soi, renforçant l’idée que l’accomplissement de grande chose passe par la dévotion personnelle en grande partie. L’histoire du film correspond parfaitement à la discussion autour du film : la rencontre de deux dingues qui, par leurs interactions, le feu et la passion qui passe entre eux, forgent une œuvre d’art et un génie de la musique qui marquera les esprits et les générations pour des années à venir, assurant qu’on se souvienne des noms des deux principaux intéressés. Ce n’est pas seulement leur dévotion personnelle, mais cette étincelle qui apparaît lorsque les deux se rencontrent qui active toute la passion, la rage, l’arrogance, l’ego et la colère qui permet de dépasser la limite du possible pour donner aux deux hommes leur vœu le plus cher.

En conclusion, Whiplash est un film épuisant, excitant et exigeant qui traite du véritable coût de l’excellence. Ancré dans deux performances qui vont redéfinir la façon dont on parle de ces deux acteurs, l’histoire de la friction entre deux ego nous fait réaliser à quel point certaines personnes se poussent pour atteindre un statut immortel, nous forçant à revoir nos idoles sous un angle beaucoup plus humain, mais aussi ultimement beaucoup plus sombre.

MUK


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