Directeur : Justin Simien
Réalisé en 2014. Avec : Tessa Thompson (Sam White), Kyle Gallner (Kurt Fletcher), Dennis Haysbert (Dean Fairbanks) et Brandon P Bell (Troy Fairbanks)
Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=BERGcYybigE
Dear
White People pastiche les relations interraciales sur
un campus universitaire juste assez pour que l’exagération rende compte des
archétypes et définisse assez clairement les relations pour forcer la réflexion
sur le sujet de façon provocatrice. Justin Simien articule ses propos via un
dialogue entre jeunes gens éduqués et intelligents, ce qui rend plus accessible
son sujet. Par contre, le réalisateur garde son coup de grâce pour le générique
final : les événements du climax du film n’ont rien de pastiches, ils sont
arrivés…à répétition dans les dernières années, justifiant entièrement tout le
dialogue que le film tente d’avoir et de provoquer, urgeant une réaction
quelconque de son audience.
Réalisé en 2014. Avec : Tessa Thompson (Sam White), Kyle Gallner (Kurt Fletcher), Dennis Haysbert (Dean Fairbanks) et Brandon P Bell (Troy Fairbanks)
Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=BERGcYybigE
L’ouverture nous présente
rapidement les personnages principaux et l’ultime manifestation de la tension
(une émeute de noirs s’en prend à une fraternité) sans rien montrer, nous
incitant à imaginer le pire. Le film rembobine ensuite cinq semaines afin de
mettre en contexte les événements qui vont mener à la colère et la violence qui
nous fut promise lors du prologue (séquence très Wes Anderson-esque si je peux
me permettre la plus évidente remarque que n’importe quel cinéphile amateur
peut sortir). Ainsi, une introduction médiatisée de la violence et tension
raciale est entièrement contextualisée tout au long du film. On nous offre 1h45
de développement de personnages, de péripéties et de relations qui démontrent
en fait la complexité de nouvelles que nous pensons pouvoir cerner après
quelques minutes d’images et un résumé d’un journaliste qui est envoyé sur les
lieux après avoir reçu des rapports de seconde main du déroulement menant à la « catastrophe ».
Les principaux impliqués
sur le campus regroupent une militante, hôte de l’émission de radio qui donne
au film son titre, le prometteur étudiant en sciences-politiques, chef de
comités et premier de classe, une bloggeuse amateur avec de grandes
aspirations, l’archétype du mec privilégié et ignorant à la tête d’une
fraternité et un jeune journaliste en quête d’une identité. Un seul de ces
personnages est blanc, je donne quelque secondes à votre esprit de déduction…Un
film plus simpliste aurait accroché le gros de la tension sur la dynamique
entre les blancs et les noirs, mais DWP
explore plus profondément les dynamiques culturelles en opposant plusieurs
approches, allant du militantisme à l’inaction totale en passant par les plus
permissifs qui cherchent à obtenir quelque chose. Ce sont ceux qui ont le plus
de motifs évidents qui semblent les plus égocentriques (soit des visionnements
sur son blog ou une personnalité politique), mais ils sont tous sur le même
pied d’égalité dans leur quête identitaire, certains ont simplement une
perception personnelle qui passe par des représentations plus tangible, rendant
« l’étiquetage » plus facile.
C’est le tissu de
relations s’entremêlant qui forme le cœur du film et donne un aspect personnel
auquel n’importe quelle audience peut s’associer qui permet de réellement
rendre accessible ce problème. Le portrait d’ensemble implique évidemment la
large question de l’identité culturelle, des tensions raciales et du racisme
institutionnalisé, mais est parsemé de petits moments personnels qui sont
universels. Le film représente la façon dont cette lutte identitaire vient
affecter chacun des aspects de la vie, que ce soit dans les relations
amoureuses*, père/fils ou dans un simple objectif de pertinence dans ce monde.
L’université est un moment de grandes découvertes et d’apprentissages, mais qui
élargissent nos horizons et amènent généralement un plus grand nombre de
questions, sur le monde et surtout sur notre propre personnalité. C’est un lieu
de défis personnels et de quête pour sa place dans un monde d’une énorme
complexité qui change sans s’arrêter pour qui que ce soit. Avec son scénario
qui saute constamment d’une lutte personnelle à une autre, il capture à tous
les niveaux ce sentiment de perte et souvent d’impuissance face à un système
qui semble déjà être entièrement mis en place par les gens qui ont précédés.
En conclusion, Dear White People, dans la lignée des
films de Spike Lee** (un point de référence évident pour Simien cité plusieurs
fois dans le film), tente, dans son fond, d’explorer la complexité d’une
situation sans offrir de réponse ou de solution claire ou satisfaisante, nous
remettant en main le flambeau, puisqu’il n’y a des limites à ce qu’un film peut
faire en terme de changements sociaux. Il force à la réflexion et remet en
question ce que l’on pense croire ou comprendre de l’actualité, dénonçant sans
équivoque l’idée que le racisme est « guérit » dans le monde.
MUK
*De plus, un film de plus
qui inclut une relation dont l’homosexualité n’est pas du tout un point d’attention
dont les personnages ne sont pas définis par leur orientation fait toujours
plaisir à voir.
**Dans l’esprit d’ouverture
complète : je n’ai vu que Do The
Right Thing, Inside Man et
plusieurs extraits de l’incroyable Bamboozled.
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