mercredi 20 mai 2015

La rançon de la gloire

Directeur : Xavier Beauvois
Réalisé en 2014. Avec : Benoît Poelvoorde (Eddy) et Roschdy Zem (Osman)


Après une œuvre aussi complexe, subtile et profonde que Des hommes et des Dieux, il est déconcertant que Xavier Beauvois réalise quelque chose d’aussi générique que La rançon de la gloire. Dans une histoire qui ne transcende jamais vraiment le fait divers historique qu’il raconte, deux performances centrales offrent un aspect rédempteur à un scénario qui ne fait pas grand-chose avec des idées pourtant très intéressantes.

Lorsque deux hommes décident de kidnapper le corps de Charlie Chaplin, il s’agit inévitablement d’individus soit découragés ou niais. Le hasard cosmique a agencé à ce crime des malfaiteurs qui sont les deux, encore plus fauchés qu’ils sont sots. Ils ont malgré tout le cœur à la bonne place, ce qui entrelace une thématique à l’anecdote. Que deux pauvres innocents (dans le sens péjoratif du terme) entreprennent de voler le cadavre de l’homme derrière Charlot, l’icône du malchanceux bien intentionné qui lutte contre le système simplement pour sa survie, est d’une perfection narrative qu’elle semblerait poussée si fictive.

Cette idée ferait un long-métrage intéressant s’il allait plus loin que répéter à quel point ces clowns qui font des clowneries associées à un grand clown est d’une coïncidence thématique incroyable! N’ayez crainte, si vous n’étiez pas certain d’avoir saisi cette subtilité, un avocat dicte de la façon la plus littérale possible cette thématique en scène finale, dans un discours parsemé d’étranges sauts dans l’image.

On n’y va pourtant pas de main morte dans la symbolique visuelle, avec d’innombrables moments qui tracent le parallèle direct entre les protagonistes et Charlot (musique de film muet qui supplante les dialogues, emphase sur les simagrées et gesticulations).  Ces rares traits de personnalité sont les plus grandes réussites du film, puisqu’elles font office d’un hommage senti à une légende. Plus d’honnêteté émotive ressort de ces séquences comiques que dans la tension centrale des protagonistes. Les jeux intéressants la rachètent en partie. L’humour physique de Benoît Poelvoorde contrastant avec la gravité sobre de Roschdy Zem permet de s’amuser avec cette dynamique, surtout dans la figure du Charlot confrontée aux réelles difficultés de la vie.

Malheureusement, cet excellent aspect loufoque est rattaché à des drames familiaux si conventionnels qu’ils contrastent avec peine au film plus intéressant qui montre le bout de son nez de temps à autres. Les raccourcis narratifs ne sont pas problématiques en soi, puisque nous parlons d’un hommage à un type de cinéma qui a fondé ces conventions. Ils sont cependant présentés de façon si insipide qu’elles ennuient au point d’être des ancres qui trainent vers le fond des moments charmants essayant de produire quelque chose de différent et original.

Malgré tout, les bons côtés ne viennent pas s’agencer pour créer un tout consistant. Le résultat décevant frustre précisément parce que l’idée centrale était si prometteuse. C’est une tiède recommandation pour certains moments charmants qui rappellent les iconiques farces du plus gentil des deux moustachus des années 30.

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