vendredi 15 mai 2015

Dancing Arabs

Directeur : Eran Riklis
Réalisé en 2014. Avec : Tawfeek Barhom (Eyad), Daniel Kitsis (Naomi), Michael Moshonov (Jonathan) et Yaël Abecassis (Edna)
Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=TW0Jjf3RrME



Le conflit israélo-palestinien est aujourd’hui si connu et ancré dans la culture qu’il semble difficile d’imaginer une histoire située dans cette région sans qu’elle touche de près ou de loin à cette crise. Dancing Arabs garde le contexte socio-politique dans les marges de la vie d’un adolescent en crise identitaire entre ses aspirations et ses origines. Grâce à des aspects plus familiers, il réussit à rendre très accessible un message identitaire à un public qui n’est pas nécessairement érudit de la situation qui encadre le récit.

Eyad est un prodigieux enfant arabe du quartier de Tira. Il est fils d’un ancien militant au potentiel gâché qui fut renvoyé d’une des meilleures écoles du pays et est aujourd’hui condamné à un travail de ramasseur de fruits. Il saute donc logiquement de joie lorsque son fils est accepté au plus prestigieux collège à Jérusalem. C’est à cette école qu’Eyad rencontre Naomi, une jeune israélienne avec qui il entre dans une illicite histoire d’amour. Après la famille et l’amour, le scénario prend une troisième tournure plus soudaine pour plonger au cœur de la véritable et très dense question qui l’intéresse, l’identité.

En débutant avec une comédie familiale plus légère suivie d’un drame adolescent aux codes habituels (moquerie des camarades, intimidation, scènes de classes sur un thème lié au récit), le film nous guide vers une finale très inattendue qui offre une perspective ultime plutôt sombre. Les multiples formes, de la comédie de situation à l'histoire d’amour en passant par le film d’adolescents, peuvent rendre l’expérience plus difficile puisqu’elles exigent une certaine confiance de la part du spectateur. Lorsque les intrigues principales sont constamment reléguées au second plan (la famille, la copine), il devient plus exigeant de suivre le véritable point central du film - l’identité d’Eyad - à travers ces nombreux sauts dans les genres. Malgré ces constants changements de point d’attention, l’intérêt demeure puisqu’il y a une maitrise du scénario qui nous garde constamment complice de la situation à l’écran, à l’aide, entre autre, de référents culturels très familiers.

Sans avoir de parti pris politique, Eran Riklis s’intéresse plus aux dommages collatéraux des individus qui se retrouvent coincés dans cette crise historique dans laquelle ils ne voient que la discrimination et les célébrations lors du bombardement de leur propre pays. Tel les protagonistes de La fiancée syrienne dont les passeports marquent « Nationalité : indéterminée », Eyad se retrouve dans un environnement qui le tire constamment dans plusieurs directions, avec une famille qui lui indique une chose, un amour interdit dans une autre part de sa vie qui complexifie le tout et un ami souffrant de dystrophie musculaire qui l’aide à remettre les choses en perspective.

Eyad se retrouve dans plusieurs situations qui le forcent à confronter des questions complexes. Que se passe-t-il lorsqu’il n’a plus rien à voir avec ceux qu’il déclarait être sa famille? Que son nom et tout ce dont il vient lui empêchent d’avancer dans la vie? Quel compromis est-il prêt à faire dans un monde qui ne fera pas nécessairement de compromis avec lui? C’est un jeune homme intelligent et débrouillard qui suit un chemin vers une résolution qui ne fait pas lui la victime, mais conclut sobrement face à l’inévitabilité de la situation.

Sans être directement centré sur le conflit israélo-palestinien, Dancing Arabs est immanquablement à propos de cette crise identitaire qui ronge une jeunesse qui, universellement, se cherche, ici, dans un environnement particulier. Il rend très concret et compréhensible la problématique, en critiquant justement les deux côtés pour faire ressortir la lutte humaine au cœur de cette tension omniprésente.

MUK


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