dimanche 6 septembre 2015

Mistress America

Directeur : Noah Baumbach
Réalisé en 2015. Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=6z8MCW16uZY
Synopsis : Le bourgeonnement d'une amitié entre deux future soeurs et leurs aventures citadines.



Comme dans l’autre excellente collaboration Gerwig-Baumbach, Frances Ha, Mistress America s’intéresse à une protagoniste imparfaite qui reçoit beaucoup d’affection de la part des scénaristes. C’est cet amour manifeste, cherchant autant à faire briller qu’à montrer justement Brooke (Greta Gerwig), qui fait de cette chaleureuse comédie une réussite.

Cette fois ci le regard du spectateur passe d’abord par une jeune admiratrice, Tracy (Lola Kirke), future sœur par alliance, collégienne et écrivaine amateur. Cette perspective qui exacerbe l’immaturité omniprésente de l’adulte approfondi l’adulte, faisant autant ressortir le bon comme le mauvais de cette perpétuelle infantilité. Cette relation guide le film et aussi le thème intergénérationnel qui suit adéquatement While Were Young, le précédent film de Baumbach sur la tension tri-générationnelle que devait affronter les adultes.

La trame narrative est un mélange de liberté flou qui navigue dans la vie des protagonistes et de dialogues vifs et pointus. Cette structure permet d’observer arbitrairement des moments de leurs escapades urbaines avec légèreté en resserrant l’attention sur les personnages, leur intelligence et leur réparti. Le tout s’ajuste à l’attitude de Brooke, traitant chaque moment avec grande importance, sans de plan précis à long terme. Elle ne ment jamais sur sa dévotion à chaque projet, relation ou entreprise, mais son incapacité à rester concentrée l’empêche de vraiment faire suivi concret.

Tant est dû à la vedette et co-scénariste, Greta Gerwig, qui est une véritable force de la nature, s’emparant du film dès son entrée et ne lâchant plus jamais prise. Elle interprète le type qui respire toute l’air dans une pièce lorsqu’elle entre et peut devenir épuisante, mais s’excuse par sa vivacité et son entrain qui lui donne énormément de charme. La balance est délicate et c’est ici que Gerwig se démarque.

Il est évidemment que le film l’aime, mais comprend aussi ses nombreux défauts et ne cherche pas à les excuser. À travers Tracy, nous apprenons progressivement à la connaitre, enlevant peu à peu les couches, jusqu’à la séquence finale où l’actrice démontre réellement l’étendue de son jeu, sautant du tragique à l’hilarant en un tournemain.

Cette apogée et pièce maitresse du film est un exemple de mise en scène et de dialogues impeccable qui jongle avec tant de morceaux en même temps que le tout pourrait devenir essoufflant. Heureusement, la réalisation confiante permet de garder contrôle sur chacun des éléments et éviter de rendre déstabilisant les incessants développements, ramenant dans un seul lieu tous les thèmes et évolutions de personnages de façon intelligente et satisfaisante.

La nature de son personnage l’oblige, l’actrice prend beaucoup de place, mais l’histoire est pourtant loin d’être un one-woman-show. Lola Kirke tient son bout dans les échanges, ne ratant aucune pique et prenant sa place même lorsqu’on ne la lui laisse pas. Le naturalisme comique de Tony (Matthew Shear) ramène un peu sur terre les moments surréels auxquels il a affaire, surtout aux côtés de sa copine, Nicolette (Jasmine Cephas Jones), qui a un rôle ingrat, mais aussi certaines des lignes les plus mémorables du film.

Le point de vue de Tracy (la nouvelle génération) fait d’un résultat final beaucoup plus conciliant que celui de Ben Stiller vis-à-vis Adam Driver dans While Were Young. Ce détail rend cette comédie aussi distrayante qu’amicale, faisant ressortir le côté « trainer entre amis » si difficile à capturer sans avoir l’air préfabriqué. Mistress America est une réussite intelligente qui passe comme un rien sans effort apparent.

Aucun commentaire:

Publier un commentaire