lundi 30 mars 2015

Wild Tales

Directeur : Damián Szifrón
Réalisé en 2014. Titre original : Relatos salvajes
Avec : Multiples protagonistes dans toutes les histoires
Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=QUnXv6R2HI8
Dans l’épisode du nouvel an de la première saison d’How I Met Your Mother, Barney Stinson introduit à son groupe d’amis son « Get Psyched Mix », un rassemblement de chansons qui sont classées dans un ordre précis pour stimuler l’enthousiasme, en déclarant qu’un bon mix ne devrait pas monter et ensuite descendre, mais plutôt débuter très fort et rester à ce niveau. Wild Tales, un rassemblement de six courtes histoires liées par le thème de la vengeance, semble adopter cette approche du « ouvrir en force » et ensuite garder le rythme. Pour un film qui présente le meurtre méticuleusement orchestré de plus d’une centaine de personnes avant même que le générique débute, il est assez étonnant qu’il réussisse son pari en maintenant une tension incroyable du début jusqu’à l’ultime résolution.


Je ne vais pas aller dans les détails de chaque histoire, puisqu’un des plaisirs du film est de faire face à un nouveau conte à plusieurs reprises, surtout lorsqu’on réalise que le film n’a aucun intérêt de faire dans le conventionel ou de s’assurer que tous se sentent bien et confortable en sortant du cinéma. Il est rare de voir un film aussi enragé et engagé que Wild Tales, un manifeste enflammé contre la stupidité, l’absurdité et l’égocentrisme qui s’immisce dans les relations de société, autant au niveau des individus que des classes. Une forme pure de « pornographie de vengeance » qui ne se fait aucune prétention d’être autre chose qu’une quête de catharsis dans un monde qui offre si rarement quelque chose d’aussi viscéral. Si Astérix avait dynamité la Maison des Fous plutôt que d’user de jeux de l’esprit pour la vaincre, il aurait parfaitement été à sa place dans ce rassemblement disjoncté de frustrations sociales.


Je ne suis aucunement au courant de la situation en Argentine, mais selon ce qu’on me dit, les choses ne sont pas à leur meilleur et c’est entre autre ce que le film explore. Par contre, il ne requiert pas de connaissances spécifiques sur ce cas pour être apprécié, puisque les tensions de classes, la cupidité, l’impénétrable bureaucratie gouvernementale, la tromperie et la vengeance sont des thèmes qui ont la capacité de rejoindre plus d’une nationalité. Personne n’est épargné dans ce monde qui se veut tout sauf réel, mené par une distillation de nos instincts viscéraux et passionnés.

Cette passion vient à un prix et le film n’est pas hypocrite avec ses émotions, ne prétendant pas offrir la solution à tous les problèmes présentés. Puisque ces frustrations font souvent dans la démesure, cette perte de raison n’est jamais récompensée, bien au contraire. Mais on se pose quand même la question de la valeur du prix par rapport aux bénéfices et cette vision du héros qui se sacrifie pour le bien commun (le meurtre d’un politicien corrompu pour quelques années de prisons par exemple). Il va sans dire que le portrait peint de l’humanité et son « Ça »freudien est peu glorieux et pourtant, il est capable de voir les bons côtés de cette passion incontrôlable. Elle peut mener à notre autodestruction, mais se tient aussi étrangement près de notre libido, qui guide nos pulsions sexuelles et qui rapproche les individus plus que quoi que ce soit (pour le meilleur et pour le pire, à la vie à la mort).

Grâce à sa structure de courtes histoires condensées, l’ensemble réussit à garder le momentum du début à la fin. Chaque histoire est concise et ne perd pas de temps à introduire le conflit initial pour ensuite construire sans arrêt sur cette tension, menant à la finale explosive qui nous laisse sur un « high » lorsqu’on retourne à la mise en situation de l’histoire suivante, pour ensuite répéter le processus, telle une montagne russe d’émotions. L’univers n’est pas particulièrement intéressé à approcher chaque situation avec réalisme, même s’il touche à des sujets très humains. Les émotions sont extrêmes, les situations sont extrêmes et les réactions le sont tout autant, laissant peu de moments au public pour relâcher son souffle. L’utilisation intelligente des codes cinématographiques rend la narration efficace et chaque petit détail semble avoir été réfléchi pour offrir tous les éléments nécessaires pour rester le plus possible dans l’histoire.

En conclusion, Wild Tales est un des films les plus enragé et survolté qu’il m’ait été donné de voir depuis The Wolf of Wall Street. Une célébration intelligente et cathartique des pulsions qui mènent nos pensées, sans nécessairement guider nos actions. Cette énergie suinte du film du début à la fin et pourra très difficilement laisser qui que ce soit de marbre (en dehors d’une anthropomorphique colonne de marbre d’église gothique du 16e siècle). Que l’on adore ou déteste l’expérience, la passion est au rendez-vous.

MUK

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