Directeur : Bill Pohlad
Réalisé en 2014. Avec : Paul Dano (Brian Wilson - 60s), John Cusack (Brian Wilson - 80s), Elizabeth Banks (Melinda Ledbetter) et Paul Giamatti (Dr. Eugene Landry)
Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=lioWzrpCtGQ
Synopsis : L'histoire entremêlée de Brian Wilson durant sa période la plus créative du milieu des sixties et ses problèmes psychologiques lors de sa relation abusive avec son docteur dans les années 80.
Le scénario d’Oren
Moverman ressemble à une version plus classique de son approche à Bob Dylan
dans I’m Not There. Les deux acteurs
jouent deux âges du musicien, mais la linéarité très stricte et les deux
histoires qui usent plus facilement de stéréotypes du biopic en font une moins
grande réussite. Tandis que I’m Not There
disséquait plus le personnage pour en faire un fidèle portrait¸ Love & Mercy tombe plus dans le
partisan qui transforme la figure en idole victime de son environnement envers
qui il faut avoir pitié plutôt qu’en individu complexe et autonome. On choisit
de survoler la période sombre de sa vie, avec la drogue et la famille
abandonnée afin d’offrir une version plus sécuritaire pour tout public de l’homme.
Prodige musical devant
faire compétition aux Beatles dans une période de redéfinition musicale
américaine intense, Wilson souffre d’hallucinations auditives qui expliquent
possiblement autant son approche singulière à la musique que ses troubles
personnels subséquents. L’importance de cette dualité est mise en valeur par le
générique final qui confirme que la dynamique n’est pas chronologique, mais
rebondit d’un âge à l’autre, avec Paul Dano crédité comme étant « Brian
Wilson – Past » et John Cusack « Brian Wilson – Futur ».
Une vie si rempli résulte
inévitablement en une dramatisation filmique réduite et puisqu’on veut couvrir
tant de terrain en si peu de temps, certains raccourcis sont malheureusement
empruntés. En dehors de la figure antagoniste du groupe, une caricature du
musicien centré sur l’argent qui rebute l’ambition du héros, tout le reste des
Beach Boys font plus office d’un entourage aux mêmes coupes de cheveux que d’un
groupe de proches collaborateurs. La femme de Wilson des années 60 est mise de
côté pour donner plus de place à son histoire amoureuse future. Certaines
personnes ne font apparition dans sa vie que pour cocher la case du biopic et
beaucoup entrent et sortent de l’histoire sans trop d’impacts ou même d’identité
claire. Cela fait de Paul Dano le penchant plus solitaire du film, puisqu’il se
retrouve entouré de non-personnages qui ne font qu’approuver ou désapprouver
ses décisions.
Les dialogues vont
souvent directement au but sans trop de nuances. Le scénario est parsemé d’échanges
« prémonitoires » qui récompensent le public de savoir ce qui est à
venir dans la vie du musicien. De plus, l’agaçant texte d’épilogue qui vient reconfirmer
à quel point son œuvre fut monumentale est ici utilisé. Ce carton pré-générique
obligatoire reflète surtout un manque de confiance en un public qui n’est soit
pas au courant de l’impact du sujet, soit pas capable de saisir un scénario qui
s’est assuré de dire textuellement plusieurs fois à quel point nous avions
affaire à un grand homme.
Les quelques problèmes
génériques sont rattrapés par plusieurs acteurs qui habitent les deux époques. Paul
Dano nous prouve qu’il peut parfois incarner un personnage qu’on ne veut pas
automatiquement frapper au visage (Looper,
There Will Be Blood, 12 Years A Slave, Cowboys & Aliens).
Il met au profit la grande innocence juvénile de ses traits pour évoquer l’émerveillement
du processus et créatif et la dévotion inébranlable d’un individu qui ne peut
faire autrement. Dano dans le studio d’enregistrement qui ajuste et expérimente
avec ses sons et l’équipe de musiciens sont la plus grande force du film.
John Cusack vend très
bien la vulnérabilité de Wilson et ses nombreux problèmes psychologiques. Par
contre, l’emphase est si forte sur le côté enfantin de sa personnalité que sa
relation amoureuse avec Elizabeth Banks souffre de ces implications
dérangeantes. Paul Giamatti se révèle être le plus délicieux du film, amenant
son personnage de docteur abusif et sordide dans des territoires de vilain de
James Bond. Chacun de ses moments à l’écran crée un malaise qui fait immédiatement
sonner l’alarme de non-confiance et son plaisir avec le rôle est manifeste et
plaisant, tout particulièrement lorsqu’il pète les plombs.
Malgré un ton de texte
très négatif, l’ensemble est appréciable. Avec une mise en scène dynamique et
un ensemble de solides performances, Love
& Mercy offre une vision compréhensible et respectueuse de Brian
Wilson. La structure narrative de sauts passé/futur intéressante n’évite
pourtant pas les problèmes conventionnels des biographies au cinéma qui rendent
le produit final agréable sans transcender le genre.
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