Directrice : Claudia Llosa
Réalisé en 2014. Avec : Jennifer Connelly (Nana), Cillian Murphy (Ivan) et Mélanie Laurent (Jannia)
Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=bQ2LIDwQ49U
Synopsis : Sont racontées en parallèle les histoires d'un homme qui tente de retrouver sa mère après 20 ans de séparations et la tragédie qui les as séparés.
Le puit des dynamiques
familiales alimente une grande partie de nos histoires. La quête du parent,
l’abandon paternel, l’enfant/parent de substitut, la mort de l’enfant, la mère
nourricière, et plusieurs autres, sont des conventions narratives qui se
retrouvent si souvent dans nos contes qu’on s’étonne encore de ne pas en être repu
par cette source à l’abondance généreuse. Aloft
est un excellent exemple d’une trame narrative aussi conventionnelle qu’un fils
adulte vivant l’abandon maternel peut encore être racontée et divertissante
lorsque entourée de solides éléments, tel des acteurs de hauts niveaux et une
réalisation soignée.
Dans une période de
désespoir face à la maladie terminale de son tout jeune fils, Nana (Jennifer
Connelly) emmène le garçon et son frère Ivan en visite chez l’architecte, un
guérisseur mystique. Un malencontreux mélange de structure de branches fragile,
d’oiseau de proie agité et de fanatiques zélés crée un incident qui marquera
leurs vies à jamais. 20 ans plus tard, Ivan devenu adulte (Cillian Murphy)
reçoit la visite d’une journaliste tenace (Mélanie Laurent) qui emprunte divers
prétexte pour finalement s’informer sur sa mère qu’il n’a pas vu en deux
décennies. Ils entreprennent donc ensemble un voyage vers cette figure d’espoir
aux réputés pouvoirs de guérison.
Dans une structure qui
rappelle le très récent Wild (ou Oculus pour les fans d’horreur), aussi à
propos d’une adulte qui entreprend une expédition fortement instruite par sa
relation avec sa mère, les nombreux bonds entre le présent et le passé
s’instruisent mutuellement. Nous vivons donc les deux temporalités en simultané,
passant de la jeunesse avec sa mère jusqu’à sa quête pour la retrouver. Cette
approche au montage permet de continuellement nous fournir l’information
nécessaire, ce qui conserve notre intérêt même lorsque l’on tombe en
territoires déjà explorés par maintes autres histoires.
Le film souffre par
contre d’un problème narratif qui retire beaucoup de tension à l’intrigue
centrale. Lorsqu’Ivan rencontre Jannia, la journaliste, pour la première fois,
il ne semble pas particulièrement misérable. Il est la référence dans son
milieu de travail (l’élevage d’oiseaux de proie), son couple ne semble pas
avoir de problème découlant de ses mésaventures d’enfance et sa vie de famille est
saine. Ainsi, il ne semble pas avoir de motivation logique à entreprendre ce
voyage puisque avant qu’on vienne remuer une plaie qui avait, selon toute
apparence, guérit, il n’y avait aucune impression de manque ou de désir de sa
part.
Ce qu’il espère trouver
au bout du chemin devient plus clair sur la route, mais semble plutôt venir de
son exposition prolongée à ses souvenirs d’enfance qu’à un trouble qui était
présent tout ce temps. Le saut de 20 ans confine l’histoire à ces deux moments
de sa vie, comme s’il y avait un élément déclencheur lors de son enfance et
qu’il avait attendu tout ce temps pour ressentir l’impact de la tragédie, ayant
vécu engourdi et heureux entre temps. La structure qui nous ramène constamment
aux souvenirs rend plus immédiate cette blessure, mais n’arrange pas le
problème en soi.
Cela est d’autant plus
problématique que sa dynamique avec Mélanie Laurent repose sur ce qu’elle
apporte dans sa vie, ce qui n’est jamais clair. Cette relation qui devient
amoureuse n’est jamais motivée par du concret qui permettrait de s’investir.
Toutefois, ce couple est secondaire en comparaison au véritable protagoniste :
le lien entre le fils et sa mère. L’acteur en charge du rôle du jeune Cillian
Murphy, Zen McGrath joue un personnage quelque peu séparé de son pendant
adulte. Cette conséquence est logique, puisqu’ils représentent un individu à
deux très différents moments de sa vie, mais cela déconnecte quelque peu les
deux histoires. Par contre, cela ne veut pas dire qu’il joue mal cet enfant
troublé à la relation complexe avec sa mère.
Sans être à la hauteur de
sa partenaire de scène, l’acteur enfant offre une grande honnêteté dans son
rôle. Jennifer Connelly joue avec fort courage l’ingrat rôle d’une mère
monoparentale qui tente désespérément de faire ce qui est le mieux pour sa
famille dans des circonstances extraordinaires. Cillian Murphy amène à lui seul
beaucoup à son personnage, autant de gravité que de sensibilité. Mélanie
Laurent, au jeu toujours empreint d’une sincère simplicité, est quelque peu
desservi par le scénario, reléguée au second plan, mais garde toujours une importance
qu’elle convie par sa présence.
Malgré une dépendance aux
archétypes familiaux de base qui comptent trop sur notre empathie automatique,
faisant tomber l’écriture dans la paresse qui n’a pas besoin de convier une
émotion, Aloft offre de solides
performances centrales qui évitent l’ennui. Une histoire racontée dans le grand
nord Canadien, un environnement peu représenté, amène une touche d’originalité
qui permet de fermer les yeux sur les
quelques problèmes qui, malgré tout, empêchent le film d’être une
recommandation sans astérisque.
Aucun commentaire:
Publier un commentaire