Directeur : Miroslav Slaboshpitsky
Réalisé en 2014. Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=xboxgEm-ucU
Synopsis : la vie d'une bande de jeune dans une école pour délinquants sourds-muets, avec toutes les activités parascolaire que cela entraine : vol, drogue, prostitution et lutte du mâle alpha.
Réalisé en 2014. Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=xboxgEm-ucU
Synopsis : la vie d'une bande de jeune dans une école pour délinquants sourds-muets, avec toutes les activités parascolaire que cela entraine : vol, drogue, prostitution et lutte du mâle alpha.
Les bandes annonces
terminent, et après les divers logos de compagnies impliquées dans la
production et la distribution, sobrement et sans musique, un message nous est
présenté : le film qui suit est présenté sans sous-titre, traduction ou
narration et met en vedette exclusivement des sourds-muets. Le défi est lancé,
autant pour le film que pour le public, 2h15 de trame narrative sans musique et
sans une ligne de dialogue compréhensible (à moins d’être familier avec le
langage des signes ukrainien). The Tribe
nous annonce comme ouverture ce qu’il est : une pure expérience visuelle.
Situé dans un pensionnat
pour délinquants, l’histoire n’en est pas vraiment une, puisque la majorité du
temps nous ne faisons qu’assister en direct à leurs activités de la vie de tous
les jours. Ce n’est pas pour dire que ce film est banal puisque leurs
quotidiens ne sont pas banals. Ces jeunes se battent –entre eux et les autres-,
ils volent et se prostituent, vendent de la drogue et agressent des étrangers.
Le fait qu’ils sont étudiants est secondaire au film.
Leur quotidien est
observé avec un regard éloigné, mais imperturbable, chaque scène composée d’une
seule prise à distance qui nous place en position d’observateur en sécurité
puisque jamais complice de leurs histoires. Cette sécurité n’est qu’en surface,
puisque les longs plans hypnotisant nous rendent voyeurs inconfortables devant
chaque anecdote que la caméra montrera sans ciller le moins du monde, peu
importe ce dont nous sommes témoins. Tout y passe, du banal à l’horrible,
créant un portrait complet, aussi dur pour ses personnages que pour l’audience.
Comme l’a dit Godard : « Chaque Edit est un mensonge » et The Tribe est brutalement honnête.
L’expérience
cinématographique force la concentration sur chaque détail visuel et créé une
immersion incroyable qui laisse sous le choc en sortant du cinéma, lorsqu’on
revient au monde qui n’est pas celui dans lequel nous venons de passer plus de
deux heures. Cet univers sans pitié est certain de laisser sa marque, soit par
sa scène d’avortement particulièrement inconfortable, soit par la finale
choquante. L’absence de coupe empêche toute issue possible et nous rend
automatiquement témoin, pour le meilleur et pour le pire. Considérez ce
paragraphe comme un avertissement : cœurs sensibles s’abstenir.
Le côté physique et le
langage du corps mis de l’avant permet de faire comprendre une histoire de
laquelle la communication nous exclut, la rendant ainsi universelle. C’est en
se concentrant exclusivement sur les interactions humaines (ce qui est exprimé
et non ce qui est dit) que l’aspect primal et instinctif ressort, avec les
quelques bruits de gorges émis, amplifiés puisque rares, qui ne sont
qu’émotions mises en sons, que ce soit pleures ou grognements. De plus, le peu
de scénario qui se déroule à l’écran joue avec les pulsions de bases d’un
groupe (ici la tribut du titre), la lutte du mâle alpha, territorial et
possessif, les combats bourrins, l’animalité de la sexualité et le simple désir
de sécurité et de survie.
En termes d’expérience,
il est difficile de faire plus unique que The
Tribe, un regard dur, mais fascinant, sur un milieu qui s’adonne particulièrement
au monde du cinéma narratif. Cette immersion est puissante dans sa brutalité et
remet beaucoup en perspectives au niveau du langage visuel et du minimum
nécessaire pour réellement comprendre l’histoire qui nous est racontée.
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