vendredi 20 janvier 2017

Nelly

Directrice : Anne Émond
Réalisé en 2017. Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=OxB-o2pWGXU
Synopsis : la vie et les tourments de l'auteure Nelly Arcan, en passant par son enfance, ses relations et sa carrière de travailleuse du sexe.



Nous avons un rapport malsain avec la place de la femme et surtout sa sexualité dans notre société : une femme trop sexuée et considérée comme une putain et une qui ne l’est pas assez est prude. La Nelly Arcan d’Anne Émond lutte dans cet environnement complexe qui ne cesse de changer ce qu’il veut d’elle. Sans être impeccable, Nelly reste un portrait intéressant d’une personnalité québécoise et ses multiples facettes.

La structure du film reflète un rapport à l’Histoire fluide qui démontre un jeu avec le réel. On saute de la jeunesse à l’âge adulte, de l’auteure à la putain, d’une sérénité à une crise et ainsi on juxtapose les extrêmes et illustre une lutte interne sans toujours avoir à l’expliciter. Comme dans sa littérature, il est difficile de distinguer ce qui est vrai de ce qui a été romanisé, mais ces éléments importent peu puisque le tout est au service d’un propos, comme toute bonne altération dans une fiction inspirée de la réalité.

L’envoutement du film est à son meilleur dans la combinaison entre les textes poétiques d’Arcan et la narration de Mackay. Le parler de l’actrice bien à elle, pas tout à fait québécois, pas tout à fait français, est le narrateur parfait pour mettre en avantage ces textes dans toutes leurs nuances. Il y a dans sa voix un mélange de tristesse, de sensualité et de colère qui représente parfaitement la voix du film.

Malgré tous ces bons coups, il reste malgré tout une certaine froideur, une distance qui empêche de pleinement se laisser emporter par le récit. Émond a clairement une vision, un regard propre à elle-même sur Arcan et quelque chose à dire, mais le film est parfois plus thèse argumentaire que drame – ce qui n’est pas tant un problème dans un cas où le propos est si pertinent. On s’investit plus cognitivement que viscéralement, ce qui ne plaira pas à tous. Une femme au talent de caméléons qui s’efforce de plaire au plus grand nombre jusqu’à se perdre finira inévitablement en tragédie et c’est une affirmation malencontreuse, mais vraie sur notre situation présente.

Ainsi, 2017 commence sur un bon pied avec un film imparfait, mais tout à fait recommandable qui donne espoir que l’année à venir sera plus intéressant pour le cinéma québécois que celle qui vient de se terminer.

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