mercredi 4 janvier 2017

Top 20 2016

Un texte d’introduction est-il vraiment nécessaire? Je sais que ce n’est pas ce qui vous amène ici.

Après son grandiose M. Gustave deux ans passé, Ralph Fiennes revient en force avec un personnage qui remue encore plus d’air. Seule personne pouvant rivaliser cet homme de feu est une Tilda Swinton muette dans le rôle de pas-David Bowie avec une performance toute en subtilité et en charme. Il est facile de se laisser séduire par ce qui est, de loin, le film le plus sexy de l’année.
#19 - Embrasse-moi comme tu m'aimes
Le film québécois de l’année (si on ne compte pas le Dolan dont l’identité est, selon moi, « française »). Une histoire d’amour qui prend de court, une panoplie de petits rôles tous plus surprenants les uns que les autres parsemés dans un univers étrange et si distrayant. Il est rare que le cinéma québécois s’aventure en tel terrain et se permette d’avoir autant de plaisir avec un médium que l’on réserve généralement aux drames familiaux ou aux comédies policières.
#18 - TheWitch
Sans être un grand admirateur de cinéma d’horreur, j’ai pourtant été envouté par l’exécution impeccable de The Witch, un film qui sait ce qu’il est, où il s’en va et maitrise-le tout à merveille. Robert Eggers utilise ses outils à leurs pleins potentiels, que ce soit sa séquence d’ouverture sans compromis, la chèvre baptisée Black Phillip, des jumeaux qu’on ne cerne jamais tout à fait ou la voix rocailleuse de Ralph Ineson.
J’ai apprécié le naturel et le charisme de Ryan Gosling dans La La Land, mais pour moi, il avait déjà exécuté sa performance de l’année en mai pour Shane Black (on a tendance à sous-estimer la difficulté d’une performance comique). De plus, depuis The Man with the Iron Fist, on sait aussi que « Russell Crowe qui a pris du poids » est une des meilleures versions de Russell Crowe. Ajouté à ce duo du tonnerre le scénario vif d’esprit et le regard mesquin de Black et vous avez une des plus grandes comédies de 2016.
#16 - Mustang
Un Virgin Suicide turc autant d’actualité aujourd’hui qu’il y a 15 ans, puisque si on se fie à une certaine élection, le monde est déterminé à ne jamais laisser aux femmes leur place sur cette planète. Les films transcendent leurs limites lorsqu’ils s’ancrent fermement dans une perspective et celle de Deniz Gamze Ergüven est solidement mise de l’avant dans Mustang.
Rarement un film sur le deuil travaille-t-il autant à la fois en subtilités qu’en humour. Grâce au stoïcisme de sa performance, Casey Affleck en dit beaucoup plus que n’importe quelles lignes de dialogue auraient pu espérer transmettre. Un lot d’acteurs remarquables habite un scénario qui cherche à nous redonner espoir lorsqu’il n’y en a que trop peu, sans pour autant avoir une vision naïve ou réductrice de la situation.
Une classe de maitre en travail de personnages, nuances et performances. L’enfant prodige du cinéma québécois se retrouve avec la crème de la crème des acteurs français et tout le monde Joue (avec un grand J) à son maximum. Avec un peu de familier et beaucoup de surprises, Juste la fin du monde épate par sa maturité et sa maîtrise. À voir simplement pour constater à quel point Dolan a grandi depuis J’ai tué ma mère.
#13 - Son of Saul
La Deuxième Guerre mondiale est probablement la période historique la plus visitée par le cinéma contemporain et il est pourtant rare qu’un film ait quelque chose de pertinent à dire sur le sujet. Son of Saul choisi une histoire déterminée et s’y tient du début à la fin pour offrir l’une des visions les plus uniques et pertinentes sur l’holocauste que nous ayons vu au grand écran à ce jour. On est d’abord déstabilisé pour graduellement être convaincu et finalement on ne peut plus regarder ailleurs.
Le film qui, sur papier, sonne le plus ennuyeux de l’année. Un père de famille au chômage se cherche un emploi du début à la fin. Pourtant, le regard sans compromis et la performance de Vincent Lindon font de La loi du marché un film essentiel sur le monde de l’emploi et la place de l’humain au sein de cette structure inhumaine.  
#11 - Aquarius
Mélangeant un portrait honnête d’une femme féroce, une perspective en colère et un commentaire social, Aquarius a tout ce qu’il faut pour me plaire! On ne perd pas de temps à s’attacher à Clara (Sonia Braga) et on est ainsi immédiatement interpelé par ses luttes personnelles. Je prends pleinement conscience du pouvoir de la machine à empathie qu’est le cinéma lorsque je me retrouve à m’identifier autant au combat d’une retraitée brésilienne veuve survivante d’un cancer.
Les démarches maladroites de Cosmo pour séduire l’élusive Raphina étaient déjà assez distrayantes en soi, mais c’est lorsque la formation musicale Sing Street entame l’enregistrement de leur premier vidéoclip – The Riddle of the Model – que j’ai compris que j’étais devant une œuvre spéciale. Un hymne à la musique et un essai sur sa puissance lorsque l’on lutte contre les difficultés de la vie, que ce soient les tensions familiales, les maux du cœur ou les tyrans du quotidien.
#9 - Tale of Tales
2016 fut malheureusement une année sans film de mon réalisateur fétiche Guillermo Del Toro, mais Tale of Tales était une compensation admirable. Une série de fables dans un modèle classique avec des leçons immortelles et des surprises à tous les tournants, dans un univers à la texture immersive habité par des acteurs ayant beaucoup de plaisir à jouer plus grand que nature.
#8 - Moonlight
Un film sur le passage à l’âge adulte qui explore la question centrale de cette transition : l’identité. Un enfant grandit et les divers éléments de son environnement forgent l’être qu’il est, deviendra, projette, etc. Les trois acteurs qui interprètent Chiron ne forment qu’un dans cette fresque qui va à l’encontre de toute attente, puisqu’elle aurait facilement pu se complaire dans la difficulté et la misère. Barry Jenkins ne cherche pas à ce que l’on s’apitoie sur le sort de son protagoniste, mais plutôt que nous le comprenions, utilisant ingénieusement l'empathie comme moteur à son récit, plutôt que la pitié.
La filmographie hétéroclite des frères Coens ne cesse de surprendre et qu’un duo de réalisateurs puisse sortir en salle bac à bac le drame musical Inside Llewyn Davis (une des trames sonores que j’ai le plus écouté de ma vie) et une célébration électrisante du cinéma sous la forme de Hail Caesar! est ébahissant. Que ces deux films soient des chefs-d’œuvre est tout simplement remarquable.
En leurs quelques années de fonctions, Laïka a déjà une feuille de route quasi impeccable et ne cesse de surprendre avec des récits tout aussi excitants que matures. Kubo utilise un univers coloré, une structure familière de quête et des personnages loufoques pour nous parler de deuil, de la pertinence des histoires et leur capacité d’immortaliser les êtres humains dans toutes leurs complexités.
Il est facile de ne pas prendre au sérieux The Neon Demon en s’arrêtant simplement à la critique que Nicolas Winding Refn met à nu ses fétichismes de surstylisation et tombe dans l’objectification du corps des femmes rapidement. Par contre, cette critique ignore toute la dénonciation faite dans ce film, entre autres avec le chef-d’œuvre qu’est la scène de nécrophilie (excellente phrase hors contexte) à laquelle je reviens plus fréquemment que n’importe quelle autre scène cette année. The Neon Demon est une œuvre complexe qui était déjà excellente avant d’en arriver à l’une fins les plus parfaites du cinéma de 2016. Cette finale prouve sans questions que Refn (désolé pour le langage) « s’en tabarnak » – preuve d’une vision singulière et authentique, pour le meilleur et pour le pire.
Cette année je suis tombé en amour (et pas à peu près) avec le cinéma de Park Chan-Wook. J’étais déjà un grand admirateur de Stoker et Oldboy (ses deux films avec le plus de visibilité), mais ce n’est qu’en explorant le reste de sa filmographie que j’ai pleinement réalisé l’ampleur de son talent. Un homme qui n’a pas froid aux yeux, qui grandit d’un film à l’autre et qui reste fidèle à lui-même tout en continuant de surprendre. The Handmaiden pourrait possiblement être le cumul de sa carrière à ce point.  
#3 - Swiss Army Man
À force de regarder des films, le simple fait de voir quelque chose de nouveau ou différent devient une raison pour s’exciter chez le critique. Si vous connaissez la prémisse de Swiss Army Man, je n'ai pas besoin de spécifier que je n'ai jamais rien vu de comparable. Ce qui aurait facilement pu être une blague originale, mais dont on se fatigue rapidement, devient un conduit pour plonger au coeur d'une réalité si simple et évidente, notre rapport au corps, mais dont on ne parle que trop peu. Ce nouveau duo de réalisateurs crée un film aux multiples lectures, toutes valides, avec la meilleure utilisation des flatulences sur grand écran. Le couple cinéma de l’année, ce n’est pas Ryan Gosling et Emma Stone, mais Paul Dano et Daniel Radcliffe.
#2 - Arrival
Liste non exhaustive de préférences personnelles au cinéma: l’étrange, l’original, les idées poussées à bout, l’exploration complexe de simples réalités et l’optimisme intelligent (voire romantisme) et Arrival continent toutes ces choses. Ce film sur le langage, la célébration de la vie et surtout l’importance de voir l’autre point de vue est réalisé avec une telle maîtrise par un directeur qui ne cesse de prouver d’année en année qu’avant peu, il fera inévitablement partie des grands.
Ce n’est qu’un bonus qu’il fut filmé dans certains de mes endroits favoris de l’Université de Montréal et ait donné un rôle parlant (1 ligne...en russe) à un acteur qui a tenu le rôle principal dans un scénario de mon cru!*
Je me le nie sans cesse, mais au fond de moi, je suis un grand romantique et aucun film cette année n’est venu jouer avec ma fibre romantique particulière comme The Lobster. Un essai déjanté sur la vision moderne des relations amoureuses qui régissent notre fonctionnement de société. Yorgos Lanthimos met de l’avant un certain cynisme pour dissimuler une passion charmante et un fond plein d’espoir. Avec une performance comique magistrale de Colin Farrell et la balance des tons la plus incroyable que j’ai vue depuis longtemps, The Lobster est mon film de 2016!
*Je n’ai pas pu résister.

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