Directeur : Denis Villeneuve
Synopsis : Une experte linguiste doit
apprendre à déchiffrer un langage extraterrestre.
La
science-fiction est à son meilleur lorsqu’elle utilise les codes du genre pour
explorer des idées humaines complexes à travers l’impossible. Arrival est
un tel film. Denis Villeneuve utilise une histoire énorme et ambitieuse pour
plonger au cœur d’une idée humaine si simple et évidente qu’il est aberrant que
l’on doive recevoir cette leçon à nouveau. Les humains sont à leurs meilleurs
lorsqu’ils communiquent et coopèrent, nous répète-t-on depuis la petite école
et nous vivons pourtant dans un monde rempli de guerre, d’ignorance et de
haine!
Dès le départ, avant même que les
extraterrestres débarquent, les problèmes de communications sont au cœur des
interactions les plus anodines, que ce soit une enseignante devant une classe
ou les bruits d’hélicoptère couvrent les voix. À travers les rencontres entre
la docteure Louise Banks et les heptapodes (extraterrestres à 7 membres), nous
apprenons diverses théories du langage et assistons plus ou moins à une classe
de maitre en communication. Le scénario guide le spectateur habilement d’une
constatation à l’autre, sans jamais donner l’impression qu’il prend son public
pour des idiots à qui il faut tout expliquer. Tout se déroule de manière
organique, jusqu’à la révélation finale qui se classe haut dans le panthéon des
retournements qui réoriente notre perspective sur une histoire. Après avoir vu
ce film deux fois, je peux dire avec confiance qu’il gagne en appréciation lors
du second visionnement.
Le tout se déroule sur un fond de tension
mondiale intense. Après Sicario, nous savions que la mise en scène
de Villeneuve excellait en atmosphère tendue et dans Arrival, le
conflit est d’une ampleur planétaire. Les enjeux sont gros, mais jamais forcés
et dans un monde où les menaces imaginaires ont mis Donald Trump au pouvoir, il
n’est pas difficile d’imaginer que certaines nations ou certains individus avec
des arsenaux militaires n’auraient pas un doigt nerveux sur la gâchette.
Pourtant malgré l’ampleur des enjeux, on ne perd jamais de vu le côté humain et
l’émotion au cœur de l’histoire qui guide réellement le récit. Interstellar approchait
certains thèmes similaires, mais l’approche didactique et intellectuelle de
Christopher Nolan empêchait ce film de prendre l’envol que l’on voudrait. Arrival contient
aussi son lot d’explications et d’intellect, mais elle ne vient jamais obstruer
l’émotivité et l’humanité du récit.
Je recommande à ceux qui n’ont pas vu le
film de maintenant sauter à la conclusion, puisque, sans explicitement révéler
trop de détails, je vais ici couvrir des idées du film qui découlent
directement du revirement. Dans un film sur la communication et le langage, le
coup de génie d’Arrival est de nous faire traverser le même
parcours intellectuel que la protagoniste, mais avec le langage du cinéma.
Notre façon de vivre et percevoir le cinéma dépend d’un langage appris, comme
n’importe quelle langue. Ce n’est qu’en adoptant réellement une perspective
différente que nous pouvons réorienter notre perception et expérimenter quelque
chose de différent. Que ce soit une relation, une décision de vie ou même la
perception du temps, tout peut être vu sous un nouveau jour si l'on accepte de
modifier notre perspective. Le génie d’Arrival (et toute excellente
science-fiction) n’est pas simplement de nous exposer cette théorie, mais de
nous la faire vivre.
Il semble qu’il fallait des
extraterrestres super-évolués qui viennent éduquer les humains pour que Denis
Villeneuve nous fasse enfin un film avec un minimum d’espoir! Mené par une
performance touchante d’Amy Adams et une direction photo magnifique, Arrival réoriente le
cerveau du public pour possiblement nous apprendre à être un peu plus attentifs
et ouverts d’esprit. De nos jours, nous avons besoin plus que jamais de ce
récit qui sert, en quelque sorte, de réponse à la tour de Babel.
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