vendredi 18 novembre 2016

Arrival

Directeur : Denis Villeneuve
Réalisé en 2016. Bande-annonce : https://www.youtube.com/watch?v=AMgyWT075KY
Synopsis : Une experte linguiste doit apprendre à déchiffrer un langage extraterrestre.


La science-fiction est à son meilleur lorsqu’elle utilise les codes du genre pour explorer des idées humaines complexes à travers l’impossible. Arrival est un tel film. Denis Villeneuve utilise une histoire énorme et ambitieuse pour plonger au cœur d’une idée humaine si simple et évidente qu’il est aberrant que l’on doive recevoir cette leçon à nouveau. Les humains sont à leurs meilleurs lorsqu’ils communiquent et coopèrent, nous répète-t-on depuis la petite école et nous vivons pourtant dans un monde rempli de guerre, d’ignorance et de haine!

Dès le départ, avant même que les extraterrestres débarquent, les problèmes de communications sont au cœur des interactions les plus anodines, que ce soit une enseignante devant une classe ou les bruits d’hélicoptère couvrent les voix. À travers les rencontres entre la docteure Louise Banks et les heptapodes (extraterrestres à 7 membres), nous apprenons diverses théories du langage et assistons plus ou moins à une classe de maitre en communication. Le scénario guide le spectateur habilement d’une constatation à l’autre, sans jamais donner l’impression qu’il prend son public pour des idiots à qui il faut tout expliquer. Tout se déroule de manière organique, jusqu’à la révélation finale qui se classe haut dans le panthéon des retournements qui réoriente notre perspective sur une histoire. Après avoir vu ce film deux fois, je peux dire avec confiance qu’il gagne en appréciation lors du second visionnement. 

Le tout se déroule sur un fond de tension mondiale intense. Après Sicario, nous savions que la mise en scène de Villeneuve excellait en atmosphère tendue et dans Arrival, le conflit est d’une ampleur planétaire. Les enjeux sont gros, mais jamais forcés et dans un monde où les menaces imaginaires ont mis Donald Trump au pouvoir, il n’est pas difficile d’imaginer que certaines nations ou certains individus avec des arsenaux militaires n’auraient pas un doigt nerveux sur la gâchette. Pourtant malgré l’ampleur des enjeux, on ne perd jamais de vu le côté humain et l’émotion au cœur de l’histoire qui guide réellement le récit. Interstellar approchait certains thèmes similaires, mais l’approche didactique et intellectuelle de Christopher Nolan empêchait ce film de prendre l’envol que l’on voudrait. Arrival contient aussi son lot d’explications et d’intellect, mais elle ne vient jamais obstruer l’émotivité et l’humanité du récit. 

Je recommande à ceux qui n’ont pas vu le film de maintenant sauter à la conclusion, puisque, sans explicitement révéler trop de détails, je vais ici couvrir des idées du film qui découlent directement du revirement. Dans un film sur la communication et le langage, le coup de génie d’Arrival est de nous faire traverser le même parcours intellectuel que la protagoniste, mais avec le langage du cinéma. Notre façon de vivre et percevoir le cinéma dépend d’un langage appris, comme n’importe quelle langue. Ce n’est qu’en adoptant réellement une perspective différente que nous pouvons réorienter notre perception et expérimenter quelque chose de différent. Que ce soit une relation, une décision de vie ou même la perception du temps, tout peut être vu sous un nouveau jour si l'on accepte de modifier notre perspective. Le génie d’Arrival (et toute excellente science-fiction) n’est pas simplement de nous exposer cette théorie, mais de nous la faire vivre.

Il semble qu’il fallait des extraterrestres super-évolués qui viennent éduquer les humains pour que Denis Villeneuve nous fasse enfin un film avec un minimum d’espoir! Mené par une performance touchante d’Amy Adams et une direction photo magnifique, Arrival réoriente le cerveau du public pour possiblement nous apprendre à être un peu plus attentifs et ouverts d’esprit. De nos jours, nous avons besoin plus que jamais de ce récit qui sert, en quelque sorte, de réponse à la tour de Babel.

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